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Marseille en transition, l’association qui agit pour construire la ville de demain

By 28 septembre 2022octobre 11th, 2022Fatchaplus, Numéro 23

Christophe Oudelin et Simone Perie nous présentent La Base à Marseille, un espace de travail partagé où des associations mettent en commun leurs moyens et leurs idées pour une transition sociale et écologique. Marseille en transition s’y inscrit dans une démarche active de transition écologique et de développement durable pour faire de Marseille une ville plus juste, plus verte et plus démocratique.

Tabasco Vidéo : Comment est née La Base ?

Christophe : Tout a commencé avec Alternatiba Marseille dont je suis aussi membre : nous étions de plus en plus nombreux à nous réunir mais les capacités des salles qui nous accueillaient étaient limitées. Très vite la question d’avoir un lieu s’est imposée et comme nous avions déjà des liens avec d’autres associations ou collectifs, nous avons voulu un lieu inter-associatif qui œuvre pour une transition écologique, économique et démocratique, dans la lignée du slogan d’Alternatiba qui est « Changeons le système pas le climat ». 

Changer le système, ça veut dire quoi ?  ça veut dire on change tout ! On revoit notre modèle de société parce qu’on estime que cette société là va droit dans le mur et qu’il faut absolument trouver d’autres solutions et du coup développer les alternatives. 

Avoir un lieu, ça permet à tous les collectifs qui sont dans cette dynamique de se réunir dans de bonnes conditions et de créer des convergences parce que le but c’est aussi ça ! Il ne s’agit pas de rester chacun entre soi mais de créer des projets en commun. 

Et « La Base » est un des projets communs. Et un des autres projets communs, c’est « Marseille en transition ».

Tabasco : Qu’est-ce que « Marseille en transition » ?

Christophe : On a créé « Marseille en transition » pour agir ! On ne veut plus attendre les politiques qui sont souvent inactifs ou qui proposent de faire des petits gestes comme éteindre le wifi ou faire pipi dans la douche, ce n’est pas suffisant. Nous on souhaite qu’il y ait une transition radicale qui s’applique dans la ville. Radicale, ça veut dire prendre le problème à la racine. On ne souhaite pas tout péter pour changer le système, non, on souhaite essayer de construire cet autre système. Donc ça c’est vraiment « Marseille en transition » qui s’inscrit dans la dynamique de “La Base”.

Tabasco : Depuis quand existe la Base et comment ça fonctionne ?

Christophe : “La Base” a été créée officiellement en février 2020. On a fait un financement participatif, il y a eu plus de 300 personnes qui nous ont donné de l’argent et on a réuni 22.000 euros pour trouver un local. Ce local, on l’avait déjà identifié, c’était celui-là dès notre première visite. II se situe dans un quartier populaire qui est assez mixte, avec des familles, des personnes âgées et  juste à côté de la station de métro « Les Chartreux ». En ce qui concerne  la gouvernance, c’est une gouvernance horizontale. C’est le modèle de société qu’on veut développer, c’est-à-dire la participation de chacun. Tout le monde a son mot à dire dans la gestion du lieu ou dans la gestion d’une association. Il y a quand même une structure juridique qui veille à ce que les valeurs soient respectées parce qu’ il faut quand même un peu verrouiller certaines choses à ce niveau-là, notamment les valeurs  de bienveillance et d’inclusion.

On veut vraiment développer quelque chose à notre image où tout le monde se sent bien et trouve sa façon de militer et de s’inclure pour ce changement de société. C’est un lieu ouvert qui fonctionne grâce aux bénévoles. On peut le réserver pour organiser des évènements, des plénières ou des réunions. Par exemple, ce soir il y a une intervention de Green Peace.

Les recettes de « La Base », ce sont les adhésions, les dons et le bar. Le bar, c’est principalement notre modèle économique, sans le bar, on ne peut pas payer le loyer. Tout le monde peut venir, il faut juste être adhérent. Et on facture aux associations qui nous réservent le lieu. Nous avons de plus en plus de nouveaux collectifs qui viennent.

Tabasco : Comment ça se passe avec les élus  ?

Christophe : Ces derniers temps, on bénéficie quand même d’un contexte politique un peu plus favorable avec le Printemps Marseillais et des personnes qui sont intéressées par les questions de transition. Ils nous reconnaissent comme un acteur compétent du territoire sur ces questions. II y a des élus qui viennent nous voir assez souvent et du coup c’est l’occasion  pour nous de faire du plaidoyer, et justement avec « Marseille en transition », c’est notre action principale. Nous, on n’attend plus pour agir, mais ce qu’on veut c’est pousser les politiques à agir ! Et comment pousser les politiques à agir ? En faisant nous-même certaines choses. On les met face à certaines de leurs contradictions.  Ils ont plein de belles idées, un beau programme mais dans les faits, il ne se passe pas grand chose. Nous, on ne veut pas attendre car on ne peut plus attendre ! 


Certains vont se mobiliser par la colère, ils vont se mettre dans des actions de désobéissance civile, dans les manifestations,  et il y a des gens qui vont se mobiliser sur leurs rêves. On touche un large public car chacun peut s’engager à sa manière, de la sensibilisation à l’action en passant par la réflexion.


Avec « Marseille en transition », on a fait un atelier d’imagination collective du futur avec les habitants du quartier, avec des gens de La base et des associations pour savoir ce qu’on aimerait faire ensemble pour se mettre en action. On a abouti à un projet qui s’appelle La Végéroute. L’idée c’est de prendre une rue et de la végétaliser. Nous avons organisé un « Village en transition », les 5 et 6 juin 2021 sur la place des Chartreux, en désobéissance civile et on a commencé à enlever le béton au pied des arbres pour planter des végétaux. Et à Marseille c’est fou, car il faut savoir que les pieds d’arbres appartiennent à la Métropole et le dessus appartient à la ville. On a fait cette action pour faire bouger les choses. La Métropole n’était pas du tout contente, ils ont envoyé la police, ils se sont plaint à la mairie et du coup ça a créé des discussions entre la Mairie et la Métropole. Et nous on parie un peu là-dessus pour les faire bouger. 

Tabasco : Quelle autre type d’action avez-vous ?

Christophe : Nous organisons des Agoras citoyennes dans la rue pour toucher les gens qui passent et pour travailler sur les imaginaires. “Marseille en transition”, c’est se projeter dans un autre monde pour se dire que, malgré le contexte de dérèglement climatique catastrophique, il y a encore un tout petit peu d’espoir. On a encore quelques années pour agir donc il faut y aller ! Agissons ! Et le fait de se projeter dans un autre imaginaire, ça agit sur un autre levier auprès des gens. Certains vont se mobiliser par la colère, ils vont se mettre dans des actions de désobéissance civile, dans les manifestations,  et il y a des gens qui vont se mobiliser sur leurs rêves. On touche un large public car chacun peut s’engager à sa manière, de la sensibilisation à l’action en passant par la réflexion. Donc voilà Marseille en transition s’intéresse surtout à un autre monde et comment le construire concrètement. Le système actuel nous mène droit dans le mur et est en train de s’effondrer donc il nous faut inventer un autre système, un système alternatif avec tous les acteurs et les actrices de la transition écologique, économique et démocratique. Il faut rassembler tous les acteurs qui travaillent sur ces questions, créer des liens et montrer qu’ils existent, montrer que ce système alternatif existe.

Simone : Je ne sais pas si vous avez vu que Marseille a été choisie pour participer au programme européen des « Cent villes neutres en carbone d’ici 2030 ». Dans ce cadre, la ville est venue nous consulter et nous espérons intégrer les commissions. Il y a deux semaines, nous avons été invités à une réunion où Benoît Payan et Fabien Perez (Conseiller municipal délégué aux financements européens) ont présenté ce programme. En décembre, 30 villes parmi toutes les villes candidates seront choisies. Dans ce cadre, on aimerait présenter le projet « Rue du futur » et le projet « Végéroute » pour le dossier de candidature. Cela veut donc dire, travailler avec les élus. Nous avons déjà un peu discuté avec Perrine Prigent (Conseillère municipale déléguée à la valorisation du patrimoine) et Mathilde Chaboche (Adjointe chargée de l’urbanisme et du développement harmonieux de la ville). Donc on espère bien intégrer les différentes commissions thématiques.

Christophe : On a une grande idée. Je suppose que vous devez connaître l’Après M qui se trouve à Sainte-Marthe (l’ancien McDo qui a été réquisitionné par les salariés). On est en relation avec eux depuis 2020, on a participé à pas mal de leurs actions et on aimerait pouvoir relier La Base à  l’Après M par de la végétalisation, en passant par la Friche de la Belle de Mai. Il y a 4,5 km de parcours. On aimerait que la Mairie et la Métropole s’accordent pour nous suivre dans ce projet.

Simone : Ce serait bien que ce projet soit inclus dans le projet Marseille 2030 / Zéro Carbone.

Christophe : Si la Mairie a vraiment l’ambition de décarboner la ville, c’est inimaginable ce qu’il faut faire à Marseille ! Donc il faut des projets ambitieux. Si vous regardez La rue du Futur, on peut y voir un résumé de toutes les les alternatives qu’il faudrait pouvoir mettre en place pour décarboner la ville : on a de la végétalisation, des arbres, des jardins potagers, du compost pour les déchets, de la récupération des eaux de pluies, des pistes cyclables, on n’a plus de voiture (sauf pour les secours et évidemment avec des transports en commun efficaces) et des façades végétalisées pour l’isolation. 

Tabasco : On espère que vous allez pouvoir contribuer au projet et que Marseille sera sélectionnée !

Christophe : De toute manière, il faut agir très vite car les conséquences du dérèglement climatiques sont catastrophiques. Je ne sais pas si vous savez ce qui se passe au Pakistan en ce moment ? C’est dramatique, 30% du pays est touché. C’est maintenant que les choses doivent se faire. Et toutes les personnes qui veulent contribuer à un changement radical sont les bienvenues à La Base !